En route pour le cœur de la forêt amazonienne. Nous faisons
une pause rapide à Tarapoto pour laver un peu de linge et se poser un peu. Comme
on ne peut pas gagner tous les jours, on s’est vite aperçu que ce n’était pas
l’endroit idéal pour la détente. La température est caniculaire, et nos petites chambres au rez-de-chaussée de l’hôtel «Viajero Wassi », ne
nous donnaient que deux alternatives possible : transpirer à grosse goutte
fenêtre fermée mais en limitant le risque de surdité ou baigner dans les
vapeurs d’essence et le concert assourdissant des moto-taxi défilant à
intervalles réguliers toutes les 30 secondes selon la couleur du feu. C’est
infernal et ça laisse peu de temps pour dormir. Hors de question d’y rester
plus, que le temps de récupérer notre linge et de trouver un transport pour Yourimagas,
le port d’embarquement des cargos pour Iquitos. L’arrivée est mouvementée sous
un déluge qui rend toute visibilité impossible. Les rues de Yourimagas
sont transformées en torrents qui font la joie des marmailles qui se baignent
dans les caniveaux. Rejoindre le port dans ces conditions est une gageure et le
chauffeur préfère nous laisser à l’agence pour attendre une accalmie.
Enfin,en début d’après midi, il devient possible de héler
deux motos taxi, pour rejoindre le port et l’embarcadère de ces barges flottantes
qui sont en fait d’énormes péniches à étages, qui descendent le fleuve chargées
jusqu’à la gueule pour ravitailler Iquitos ainsi que l’ensemble des petits
pueblos sur le chemin, dont le fleuve est l’unique voie d’échange commercial. La pluie continue de tomber, même si le débit
est moindre, les camions alignés sont fermés et l’activité du port est au point
mort. Seul le capitaine est sur le pied de guerre et accueille les passagers
pour les répartir sur les deux niveaux de la barge : le premier prés de la salle des machines, sans ouverture ou très peu, et au contact des
caisses de poissons en bois qui laissent filtrer une odeur puissante et
tenace,le second, plus aéré et plus agréable où le hamac est indispensable pour la traversée,
et enfin, juste à coté viennent les placards à balais qui nous serviront de
cabines pendant la traversée. Nous n’avons pas osé les 3 nuits en hamacs avec
les filles et les sacs à dos et l’avenir nous a donné raison. En fait de 3
jours, c’est 6 jours et 5 nuits que nous allons passer sur le bateau, dont deux
à attendre au port que l’Edouardo VIII, veuille bien se décider à partir avec
comme seule occupation d’assister passivement au chargement de centaines de
sacs d’oignons d’une centaine de kilo et de milliers de sacs de riz tout aussi
lourds et de toutes sortes d’autres choses variées et improbables chargées sur
le dos et la tête des dockers de Yourimagas . Actuellement le niveau du fleuve
est au plus bas rendant le chargement et la navigation particulièrement compliqués. Les quelques marches taillées à la pelle dans ce devers
de boue et recouvert de sciure n’enlève rien au mérite des dockers lourdement
lestés, d’arriver à garder le pied sûr et de ne pas répandre leur précieux
chargement dans la boue ou dans le fleuve.
Le port de Yurimagas sous la pluie
Tant que les camions sont pleins, on reste!!
L'Edouardo fait aussi poissonnerie
Les hamacs de la seconde passerelle
Enfin,nous sommes réveillés vers 5h00 le samedi 1er
août, par une sirène puissante qui salue le personnel resté au port et nous
signale que le départ est enfin d’actualité. Que ce fut long cette attente dans
la chaleur et la moiteur du port au milieu des déchets de la ville charriés par
le fleuve et c’est bien agréable de sentir de nouveau le vent sur nos visages
et l’air un peu plus frais du fleuve. En se rendormant, nous comprenons rapidement que les nuits risquent d être compliquées. La barre du navire grince
de façon sinistre à la moindre courbe du rio et nous percevons en détails les
moindres déplacements du personnel naviguant au dessus de nos têtes. Vers
12h00, nous sommes de nouveau amarrés à un tronc sur la rive et, après avoir un peu pataugé en espagnol, nous comprenons qu’à cet endroit le fleuve fait
moins de 7 mètres de profondeur et le risque d’accrocher le fond est non
négligeable. Il nous faut attendre l’Edouardo X, un autre bâtiment de la flotte plus léger et
avec un tirant d’eau plus faible, pour qu’il puisse nous tracter en cas
d ‘échouage. Notre patience s’envole progressivement et une petite déprime
s’installe au sein de la famille avec les filles se battant avec la tourista,
des chiottes d’anthologie dont la description est impossible sans une
projection en odorama et des douches immondes à souhait, ouvertes sur l’extérieur, rendant toute intimité
illusoire et nous faisant bénir les capacités d’anticipation de Fred et
son paquet de lingettes magiques. Finalement, le moral revient avec l’arrivée
de l’Edouardo X, qui nous dépasse et nous ouvre la voie et rien de pourra plus
entraver notre descente fluviale vers Iquitos et la forêt amazonienne.
Le fleuve décrit de larges courbes et s’élargit
progressivement rejoint par d’autres petits rio qui viennent l’alimenter. Les
rives, que nous apercevons par intermittence alors que le bateau louvoie selon
un itinéraire précis, alternent les zones boisés repères de dizaines d’espèces
d’oiseaux bigarrés dont les chants sonores et variés arrivent à nous faire
oublier parfois les turbines du cargo, et les zones cultivées véritables petits
ilots gagnés sur la forêt, ou vivent quelques familles dans des cases de bois
sur pilotis, laissant à penser que l’Amazone n’est pas toujours ce calme cours
d’eau à peine ridé par le souffle du vent.
Le fleuve Maranon
Un Edouardo light
Pour nous, sur le bateau, la vie s’organise au fil du
courant, entre l’observation du fleuve et ses splendides couchés de soleil embrasant le ciel, de longues séances de
jonglage pendant lesquelles Juliette nous montre toute l’étendue de son talent
aux Bolas et qui donnent lieux à d’uniques et inoubliables moments de partage
entre saltimbanques itinérants, un peu de chant au son de la guitalélé autour
d’une bière ou d’un coca, un peu de devoirs, le remplissage des carnets de
voyage, l’écriture des messages sur le blog et de longs moments d’observation à
regarder paisiblement le temps qui passe…quel luxe !! Les escales sont
nombreuses et chaque fois, de jour comme de nuit, le même balai bien rodé des dockers qui chargent et
déchargent le navire apportant l’indispensable pour les habitants de ces villages
isolés dont les routes s’arrêtent sitôt les dernières maisons atteintes. Le
fleuve est toute leur vie, et l’arrivée du bateau s’accompagne d’une activité
frénétique sur le port, qui ne dure que le temps de l’escale, et qui voit des
dizaines de familles arriver en pirogues ou en moto-taxi, charger les quelques
sacs de riz, de maïs ou toutes autres choses utiles à la vie quotidienne jusqu’au
passage du prochain bateau. C’est un spectacle typique de la vie amazonienne
qui nous a définitivement réconcilié avec la descente du fleuve et à relégué bien
loin les petits désagréments du quotidien
sur le bateau.
mais le matou revient...
L'effervescence aux escales
Nous arrivons finalement à Iquitos le 1er
septembre et après une courte escale prés du port pour vérification de la
cargaison, nous finissons par débarquer et rejoignons l’Hôtel Solimoes, qui
nous a été chaudement recommandé par un habitant d’Iquitos, pour y poser nos
sacs à dos, fatigués mais sans aucun
regret d’avoir effectuer cette extraordinaire descente au fil de l’eau.
Enfin le port d'Iquitos!
Wouaou.... quelle aventure. Bravo pour ces belles leçons de vie et patience!!! bises
RépondreSupprimerJe lis régulièrement vos récits que je trouve géniaux. Quelle belle aventure vous vivez, et quel enrichissement pour les filles, c'est plus important que 4 mois d'école! Bravo pour vos commentaires et photos, il faudra en faire un livre, c'est vraiment bien écrit. Vivement que vous alliez en Bolivie que je revive ce pays qui m'a laissé beaucoup de souvenirs. Bon vent à vous 4 Je vous embrasse.
RépondreSupprimerSabine
Bonjour Juliette, c'est Emily.Tu adores ce voyage avec tes parents ? J’espère que tu t’amuses bien là bas.
RépondreSupprimerA bientôt Juliette.